entraîner [1]

• 1Traîner avec soi, après soi. Le torrent entraînait des arbres. Vous laisserez-vous entraîner à l'autel sans vous plaindre ? [Lesage, Le diable boiteux] Que tout chargé de fers à mes yeux on l'entraîne. [Voltaire, Zaïre] Elle l'entraîne dans la chambre voisine. [Genlis, Veillées du chât. t. I, p. 197, dans POUGENS] Par mon ordre arrêté devant vous on l'entraîne. [Delavigne, Les vêpres siciliennes]

  Fig. L'âme est donc toute esclave ; une loi souveraine Vers le bien ou le mal incessamment l'entraîne. [Corneille, Oedipe] Peu s'en fallut qu'elle n'entraînât Juda dans sa ruine. [Bossuet, Discours sur l'histoire universelle] Et sans cesse veiller à retenir mes pas Que vers vous à toute heure entraînent vos appas. [Racine, Bérénice] Mais les rois en tombant entraînent leurs flatteurs. [Racine, La Thébaïde, ou Les frères ennemis] Si le destin entraîne celui qui résiste, il ne fait que guider celui qui veut. [Condillac, Hist. anc. III, 22]

• 2Agir sur les sentiments. Cet orateur entraîne tous les esprits. Il a entraîné tout le monde dans son sentiment. Le mauvais exemple nous entraîne. Madame sait appuyer le sien [avis] par des raisons si convaincantes, qu'elle m'a entraînée de son côté. [Molière, Critique de l'école des femmes] Comme ils ne gagnaient rien avec leurs doctes ouvrages, et que l'éloquence d'Osiandre entraînait le monde. [Bossuet, Histoire des variations des Églises protestantes] Et l'on craint, s'il paraît dans ce nouvel orage, Qu'il n'entraîne après lui tout un peuple volage. [Racine, Phèdre] Je me livre en aveugle au transport qui m'entraîne. [Racine, Andromaque] L'amour le retient quand la crainte l'entraîne. [Racine, Alexandre le grand] Dans ces occasions, c'est le public qui entraîne ses maîtres, et les force à se joindre à lui. [Fontenelle, Boerhaave.] Ces paroles douces et flatteuses qui se glissent comme un serpent sous les fleurs, loin de déplaire aux princes, les charment et les entraînent. [Rollin, Histoire ancienne] Je cède à la pitié dont je suis déchirée ; Je n'y puis résister, elle entraîne mes sens. [Voltaire, Le fanatisme, ou Mahomet le Prophète] Il fallut dérober cette tendre victime Au fatal ascendant qui l'entraînait au crime. [Voltaire, Œdipe] Elle ne jugeait pas, elle se laissait entraîner. [Genlis, Veillées du chât. t. III, p. 125, dans POUGENS] Vous m'avez entraîné dans ce complot funeste. [Delavigne, Les vêpres siciliennes]

  Absolument. Le charme de cette lecture entraîne. La voix publique entraîne ; Même en s'en défiant on lui résiste à peine. [Voltaire, Tancrède]

• 3Être la cause, avoir pour conséquence. La guerre entraîne avec elle ou après elle bien des maux. Elle a cru que ma perte entraînait sa ruine. [Racine, Britannicus] ....Tant de prudence entraîne trop de soin. [Racine, Andromaque] Mais trop de vers entraînent trop d'ennui. [Gresset, Ver-Vert]

  Terme de jurisprudence. Avoir pour effet nécessaire. Toute peine afflictive et infamante entraîne la perte des droits civils.

• 4S'entraîner, vpron S'entraîner l'un l'autre. Ils se sont entraînés de faute en faute.